Extrait des "Questions parlementaires" (19/01/21)
06.01 Malik Ben Achour (PS): Selon 80 organisations de la société civile, la situation en Haïti s'est aggravée. L'approvisionnement et les conditions de vie des habitants se sont détériorés. La corruption et le détournement de 1,5 milliards d'euros destinés au développement n'arrangent rien. Les gangs armés renforcent encore davantage le sentiment d'insécurité. Le Bureau intégré des Nations Unies en Haïti a recensé 159 assassinats et 92 blessés au cours du premier semestre 2020. Aucune enquête liée à ces faits ne progresse et aucun procès n'est à l'ordre du jour, renforçant un sentiment d'impunité. L'assassinat du bâtonnier de Port-au-Prince, le massacre de Bel Air, un quartier de la ville, et la mise en place inconstitutionnelle d'un Conseil électoral provisoire pour hâter des élections attisent encore la situation.
Depuis juillet 2018, la population se mobilise contre la corruption et l'autoritarisme, malgré les réponses du gouvernement. Élu avec 10 % des voix et gouvernant par décret, Jovenel Moïse serait mis en cause dans le scandale Pétrocaribe et les massacres.
Quelles sont les informations de nos postes diplomatiques? Avez-vous des informations sur l'organisation d'élections? Avez-vous des échanges avec vos homologues sur l'impunité et la sécurité?
06.02 Sophie Wilmès, ministre (en français): Les informations reçues confirment votre préoccupation. L'instabilité politique est à l'ordre du jour: manifestations, revendications par l'opposition, fin du dialogue national. Le Parlement reste caduc et le président Moïse gouverne par décret. S'y ajoute un climat d'insécurité, avec la violence des gangs armés et la recrudescence des kidnappings à la veille d'élections sensibles.
Seule consolation, la pandémie a fait moins de dégâts que prévu. Le président a publié un décret annonçant la formation d'un conseil électoral provisoire, mais la société civile et l'opposition le critiquent car il n'a pas eu de consultation sur les membres du conseil.
L'organisation d'un référendum sur la nouvelle Constitution serait inconstitutionnelle. La société civile demande des conditions pour des élections transparentes et est sensible à toute ingérence dans la définition du calendrier politique pour le pays.
Une partie de la société civile ne valoriserait pas les élections, alors que pour d'autres elles sont nécessaires face à l'impasse politique. Je n'ai pas encore eu d'échange avec mes homologues sur cette question, mais notre pays est intervenu régulièrement sur la question au sein des groupes de travail de l'UE et au Conseil de sécurité des Nations Unies. Lors du débat sur Haïti, le 5 octobre, la Belgique a souligné cette question essentielle de l'impunité et de l'insécurité. Il en est de même au sein des groupes de travail de l'UE.
06.03 Malik Ben Achour (PS): Vendredi dernier, plusieurs centaines d'opposants ont manifesté leur volonté de voir le président Moïse quitter le pouvoir. Son implication dans les violences qui frappent la population du pays semble avérée alors que celle-ci est touchée par la pauvreté endémique et structurelle depuis des années.
L'incident est clos.