P-au-P, 09 mars 2021 [AlterPresse] --- Plusieurs organisations haïtiennes du mouvement social et populaire dénoncent le processus d’accaparement des terres des paysannes et paysans, à Savane Diane (Artibonite), dans une note conjointe transmise à l’agence en ligne AlterPresse.
Ces organisations haïtiennes du mouvement social et populaire rejettent l’octroi de plus de 8,600 hectares de terres, pour une zone franche agricole dénommée « Zone franche agro-industrielle de Savane Diane » à une seule famille (Apaid), à travers un arrêté présidentiel, publié dans le journal officiel « Le Moniteur », en date du 8 février 2021, au lendemain de la fin de mandat de Jovenel Moïse.
Établie sur quatre (4) communes de trois (3) départements géographiques du pays (Saint-Michel de l’Attalaye / Artibonite, Maïssade / Plateau central, Pignon et Saint-Raphaël / Nord), la concession de terres à Savane Diane devrait produire du Stévia au profit de l’entreprise Coca Cola, rappellent-elles.
Cette décision vient aggraver la situation de plusieurs dizaines de milliers de familles paysannes, qui assurent l’économie paysanne et la souveraineté alimentaire du pays, estiment ces organisations.
« Cette zone franche est créée sur la propriété privée de ma famille et non sur une propriété appartenant à l’Etat haïtien, comme le stipulent les titres de propriété soumis au Ministère de l’Agriculture (MARNDR), au Ministère du Commerce et de l’Industrie (MCI), à la Direction des zones franches (DZF) et au Conseil national des zones franches (CNZF) depuis 2019 », affirme Louis Déjoie III dans une note publiée en février dernier par le quotidien Le Nouvelliste.
Le mandataire de la famille Déjoie ajoute que « le promoteur de la zone franche est la 1ère société créée conjointement, "Stevia Agro Industrie S.A.", communément détenue par les familles Apaid, Déjoie, Celcis et Dorcin ».
De leur côté, les organisations sociales qualifient de d’ « acte illégal », la mesure gouvernementale, confirmant « le caractère anti-paysan, antinational du régime actuel, pour satisfaire les desiderata d’un petit groupe de bourgeois apatrides… en complicité avec des multinationales, des entreprises capitalistes, contre les intérêts du pays, de la majorité de la population ».
Ces organisations haïtiennes du mouvement social et populaire appellent les autorités de la transition de rupture à prendre toutes les dispositions, pour annuler tous les décrets et arrêtés « illégaux » ainsi que toutes autres décisions, prises par le régime de facto à l’encontre des paysannes et paysans haïtiens, en particulier les actes d’accaparement des terres et espaces de vie.
Elles demandent à l’État haïtien de définir des politiques publiques, pour assurer le développement de l’agriculture paysanne familiale agro écologique pouvant favoriser la souveraineté alimentaire et le renforcement de l’économie paysanne.
Il faut aussi mettre un terme à la politique d’installation de zones franches sur les terres agricoles et à l’exploitation minière, qui menace la vie des communautés, l’environnement et le bien-être collectif.
L’Institut national pour la réforme agraire (Inara) doit être doté de structures et moyens adéquats, pour réaliser une réforme agraire intégrale, selon les prescrits de l’article 248 de la Constitution de 1987 amendée.
Cette réforme devrait permettre de garantir un modèle de gestion durable et solidaire des ressources du pays, en particulier des terres agricoles, dans le cadre d’un nouveau modèle agraire basé sur l’agroécologie et l’économie paysanne, souhaitent ces organisations sociales et populaires.
Il s’agit de Tèt kole ti peyizan ayisyen (Tk), de Solidarite fanm ayisyèn (Sofa), du Kolektif jistis min (Kjm), de la Plateforme des organisations haïtiennes des droits humains (Pohdh), de l’Institut culturel Karl Levêque (Ickl), du Mouvement démocratique et populaire (Modep), de la Plateforme haïtienne de plaidoyer pour un développement alternatif (Papda).